Participants: Colin Pelletier, Felix Würgler
Depuis nos crêtes du Jura, le groupe Eiger, Mönch et Jungfrau capte notre regard et nous fascine, qu'on soit alpiniste ou non. De ce trio, il me manquait encore l'Eiger. Sa traversée par l'arête du Mittellegi me tentait depuis longtemps, donc un but idéal pour clore en apothéose la saison de haute montagne . Nous voilà donc avec Colin dans le train pour le Jungfraujoch. Colin, jeune grimpeur talentueux qui a encore toute une vie prometteuse d'alpiniste devant lui, avec un vieux briscard qui pourrait être son grand-père mais qui a conservé sa faim de la montagne.
A la station Eismeer (mer de glace), nous quittons le monde feutré du train avec ses touristes en majorité asiatiques, pour descendre par une galerie sur le glacier étincelant et sauvage; quel contraste!
Loin à l'horizon nous apercevons la cabane Mittellegi, perchée sur l'arête tel un nid d'aigle. Pour y arriver, il faut passer sous des séracs menaçants et escalader un éperon rocheux pour atteindre des vires ascendantes qui mènent à la cabane; c'est tout de suite du sérieux!
A la cabane que nous atteignons rapidement, nous jouissons d'un coucher de soleil de rêve sur une mer de brouillard. Quant à l'itinéraire, tout est clair: il faudra suivre le fil de l'arête effilée qui se dessine à l'horizon jusqu'à l'Eigerjoch Sud; une chevauchée aérienne qui promet.
Nous sommes une bonne vingtaine à la cabane et tous envisagent de faire le même itinéraire, sauf un Espagnol qui veut sauter en base-jump depuis un point propice à proximité du sommet.
La jeune gardienne très accueillante nous communique l'ordre de déjeuner et de départ pour le lendemain. Comme d'habitude, les cordées avec guide ont la priorité et nous sommes donc les derniers à partir le matin. En quittant la cabane dans le noir, nous voyons déjà une guirlande de lampes frontales sur l'arête.
Heureusement que toutes les cordées avancent bien, de sorte que nous ne sommes pas freinés par des bouchons. Les passages sur l'arête sont parfois très exposés et demandent un bon équilibre pour ne basculer ni sur la sombre paroi Nord ni sur la belle paroi Sud qui descend de 700 mètres à pic sur le glacier.
L'ambiance est grandiose et nous progressons toujours ensemble, soit en corde courte, soit en corde tendue, selon le terrain. Malgré la neige tombée trois jours avant, nous n'avons pas besoin de mettre les crampons . Bientôt le Soleil nous chauffe et nous arrivons au sommet, où nous profitons une petite heure de la magnifique vue et ambiance. Nous oublions presque qu'il faudra bien redescendre et que la course est encore longue. Par l'arête sud, truffée de quelques rappels, nous descendons sur l'Eigerjoch Nord, puis nous passons à l'Eigerjoch Sud par une belle mais longue arête mixte que nous escaladons crampons aux pieds. Reste encore la marche un peu monotone sur le glacier pour retourner au Jungfraujoch en contournant le Mönch par le Mönchsjoch.
Dix heures après avoir quitté la cabane isolée et insolite de Mittellegi, nous plongeons de nouveau dans le monde du tourisme de masse vers le Jungfraujoch, où nous, les Yétis exotiques, sommes sollicités par des touristes asiatiques pour un selfie.
Merci Colin d'avoir partagé cette magnifique course avec moi; je me réjouis déjà de la prochaine aventure avec toi!!
Felix
Photos:
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